« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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lundi 19 septembre 2016

Veau ou maroquin? La hiérarchisation des exemplaires selon M. Christian Galantaris

Amis Bibliophiles bonjour,

Ca se chamaille, d'un côté les "jansénistes" adeptes des reliures les plus simples, qui mettent en avant leur ascétisme, de l'autre les amateurs de belles reliures, ce qui ne veut pas dire qu'elles emballent des textes médiocres...

"Cet exemplaire disponible chez un ami libraire n'est il pas plus désirable que le mien? Et si j'améliorais?". "Que vaut-il mieux, un vélin d'époque ou un veau d'époque?", "Janséniste ou décoré, quel maroquin est le plus recherché?", etc. 

Autant de questions que tout bibliophile se pose un jour, même s'il sait bien au fond de lui que la valeur d'un exemplaire à ses yeux ne dépend pas seulement de sa condition... mais aussi par exemple, de la personne qui vous l'a offert, de l'endroit où vous l'avez acquis, dans quelles conditions, à quel moment de votre vie, de son coût, réel ou symbolique, etc.

Pour aider les bibliophiles à y voir plus clair sur la qualité (et non la valeur que chacun accorde, par opposition à la valeur économique), M. Christian Galantaris présente dans son inestimable Manuel de Bibliophilie (Editions des Cendres) une classification des exemplaires, "du moins attractif (1) au plus excitant (8)".

"1. Reliure moderne, marges courtes, papier bruni ou obscurci par des rousseurs ou - au contraire - outrancièrement lavé ou trop blanc.
2. Reliure moderne, marges moyennes (rarement grandes, car la reliure moderne présuppose une ou deux reliures antérieures, chaque reliure imposant un nouveau rognage des marges).

3. Reliure ancienne de basane (dos lisse ou à nerfs, sans décor ou discrètement orné).
4. Reliure ancienne de vélin ivoire souple ou à plats rigides (montés sur carton). Cette condition, plaisante mais modeste sans aucun décor, prend un attrait et une plus value particulière s'il s'y ajoute une ornementation dorée sur les plats.
5. Reliure en veau ancien (brun, marbré, raciné, blond, etc.) à tranches nues, marbrées, quelquefois dorées avec dentelles intérieure (autant de signes d'une reliure soignée et de qualité). S'il y a une petite dentelle ou des armes sur les plats, la valeur augmente notablement.
6. Reliure ancienne en maroquin (janséniste ou avec trois filets dorés en encadrement sur les plats, dos orné, tranches dorées et dentelle intérieure, etc.).
7. Reliure ancienne en maroquin (à dentelle, aux armes, avec super ex-libris attestant une origine célèbre).
8. Reliure ancienne mosaïquée, qui se rencontre sur les almanachs ou les livres de piété, mais qui est pratiquement introuvable sur un texte d'une autre nature, à tel point que, si l'intérêt du texte est à la hauteur d'une telle reliure, il y a tout aussitôt lieu de suspecter quelque opération de remboîtage".
Bien sûr, tous les cas ne sont pas envisagés (ainsi les reliures rétrospectives du 19ème signées de grands relieurs, ou les vulgaires basanes d'époque signées par un auteur ou amateur célèbre, etc.), mais il n'est pas non plus interdit aux bibliophiles de faire preuve d'un peu de jugeotte.

Merci M. Galantaris, la lecture de votre Manuel devrait être obligatoire dans toutes les bonnes écoles primaires.

H

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci H. pour ce salutaire rappel méthodologique !

Cette typologie n'empêche personne d'avoir ses marottes (moi ce sont les demi-maroquins à coins soignés des 19 et 20e, sur de minces plaquettes ou E.O. !).

Même si, avec le temps, à force d'en "toucher" (c'est de la peau après tout), je deviens sensible aux beaux maroquins 18e et aux vélins dorés (quand j'en croise) !

A chacun sa bibliopégimanie ;-)

B.

Anonyme a dit…

Des découvertes à venir ? (un scanner qui permet de "voir à travers les pages - sans trop endommager le support... Cf. le Voynich...)

http://www.archimag.com/archives-patrimoine/2016/09/12/incroyable-camera-lire-livre-ferme

calamar a dit…

on a l'impression, tout de même, que cet ordre n'est plus forcément d'actualité ; notamment il ne mentionne même pas les brochés ; et les vélins, mêmes non dorés, semblent avoir une cote assez importante... mode ou pas ?

Anonyme a dit…

Merci, Hugues, d'avoir posté à nouveau ce bel article qui suscite bien des réflexions. On peu évidemment discuter tel ou tel choix de M. Galantaris, mais son 'palmarès' est plutôt convaincant. Je rêve de posséder un jour un Montaigne ou un autre grand auteur en maroquin d'époque mosaïqué !!... Mais ne rêvons pas trop. Un maroquin, un vélin doré suffirait à mes attentes.
Plus difficile de comparer des reliures d'époques différentes... Personnellement, je préférerais un très beau maroquin doublé XIXe (Lortic, etc.) recouvrant un bel ouvrage qu'un exemplaire ancien en peau modeste. J'aime beaucoup le vélin ancien, tout simple, mais n'a-t-on pas connu depuis quelques décennies une sorte de mode qui consiste à valoriser toujours la reliure ancienne (même très vilaine) aux dépens des belles reliures modernes ?

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