« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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mercredi 23 décembre 2015

La Bibliophilie, soyons sérieux, c'est quand même une affaire d'hommes :)

Amis Bibliophiles bonjour,

Auprès de ma cheminée, dégustant tranquillement une bonne bouteille (Chateauneuf-du-Pape pour ne rien vous cacher) et devisant avec des amis bibliophiles, j’ose dire que la pratique de la bibliophilie est une activité jouissive. 

Un tollé général bondit sur mes propos: Halte-là! Ce n’est pas que cela! Provocation! Je sens bien que chacun cherche un éclaircissement, une précision qui leur permettrait de s’affirmer, en toute amitié bien sûr. Savourant mon effet et m’assurant du silence de la réflexion en prenant le temps d’apprécier une gorgée de ce nectar, je me lance: le bibliophile jouit à mon sens soit de façon intellectuelle soit de façon sensuelle. Chacun opine du chef d’un air entendu mais prudent en attendant la suite….J’en profite pour persévérer dans ma provocation et j’éclate: tout cela n’est que machisme! La réaction dubitative est unanime: il faut que je m’explique! 

Une pause inspiratoire suivante, je peux calmement mais brièvement exposer ce que je voulais dire: Lors d’une rencontre avec une libraire du SLAM très connue et reconnue par toute la profession des librairies de livres anciens, elle m’a avoué que dans sa (vaste) clientèle, elle n’avait que de très rares femmes, l’essentiel des achats était fait par des hommes. Ainsi, il n’existerait plus que très peu de bibliophiles femmes? Et pourtant chacun peut en citer, des très connues, mais aussi, quand même, anciennes. Les femmes actuelles seraient-elles différemment intellectuelles ou différemment sensuelles si on reprend ma classification « à la hache » ci-dessus ? Aussitôt mes convives rassérénés, surement parce qu’ils ne se sentaient plus attaqués, modulèrent leurs interventions: il ne fallait pas voir les choses comme ça, le problème était mal posé l’éducation était différente…… 

Bref on fut tous d’accord pour mettre cette conversation de côté, sous la seule responsabilité de ce merveilleux nectar qui nous avait chauffé les neurones… 


Mais aucun de nous n’avait envisagé de poser la question aux femmes bibliophiles. Pour Noël, j’aimerais bien qu’elles s’expriment, pour nous dire si la bibliophilie est pour elles une question d’intellect, de sensualité, d’éducation, de tradition, de transmission……ou simplement pour nous dire qu’elles existent et qu’elles ne se sentent pas exclues de cette passion pour laquelle tant de femmes ont oeuvré. 

Je ne sais pas pour vous, mais pour moi ce serait un merveilleux cadeau.

Patrice

....

Vraie question que celle de Patrice, on croise peu de femmes sur les salons, encore moins dans les librairies et presque jamais sur le blog. Je me demande même parfois si j'ai des lectrices.


Le blog propose en tout cas deux articles sur le sujet.


19 commentaires:

Unknown a dit…

Il y a plus que du vrai dans ce constat.
D'ailleurs le premier contact avec un livre (bien relié s'entend) n'est-il pas l'inverse de celui charnel : on le lit des doigts et le caresse du regard !
François

Anonyme a dit…

La présidente du Slam et les filles du libraire d'Europe qui a les plus beaux livres, seraient donc des arbres qui ne cachent aucune forêt, il y a aussi la librairie des Amazone. Cela fait quand même quatre libraire(e)s SLAM avec de très beaux livres, et j'en oublie sans doute, pour les amazones je suis persuadé que cette librairie a une clientèle très féminine, mais qui fréquente peut être peu les salons masculins. Les femmes seraient elles donc vénales ? Les seules qui aimeraient les livres les vendent...

Sourire

Unknown a dit…

Bonsoir

Je suis bibliophile depuis bien longtemps, n'ai jamais reagi aux commentaires sur les femmes bibliophiles, meme l'enquete du Slam il y a quelques années. Je me souviens qu'il y a d'un de mes premiers achats pour un montant respectable d'un ouvrage aupres d'un celebre libraire parisien, c'est tout juste s'il ne m'a pas demande si je savais lire...
Oui il y a des femmes bibliophiles, forcément discretes dans un univers tres masculin ou le fait d'etre reconnue comme bibliophile est encore plus difficile que d'etre reconnue professionnellement dans certains metiers. Oui j'aime les livres, pour bien des raisons, contenu, reliure, provenance, ouverture sur des sujets... Il ne se passe pas une journee sans une quelconque activite en liaison avec ma bibliotheque, ne serait que parcourir quelques pages au hasard mais egalement collationner, rechercher, simpliment regarder ou lire... cela revet forcement une certaine sensualite. Je crois aux bibliophiles amateurs de la vie dans tous les sens du terme, ouverts sur les arts, la gastronomie... Cela dit je dois beaucoup aux hommes qui m'ont appris a aimer les livres, qui orientent mes choix, et j'ai beaucoup de plaisir a partager avec des femmes libraires puisque je dois faire partie de cette tres faible proportion de femmes bibliophiles. En tout cas merci de vous y interesser

Patrice a dit…

merci Veronique.Hugues doit être soulagé!

Patrice

Laura a dit…

Bonjour,

Petit témoignage personnel sur la bibliophilie. Je crois que pour moi c'est plus le regard qui compte sur le toucher ou l'odeur des livres anciens. Depuis que j'ai su lire j'ai aimé la lecture et mon grand-père avait une belle bibliothèque avec des jolie reliures (et maintenant que je les vois, je sais que ce sont des livres du XXe façon club de lecture et reader digest, la magie de l'enfance c'est envolé, c'est un peu triste). J'ai acheté mon premier livre ancien au lycée, c'était un petit in-12 "dictionnaire de la fable" relié en basane du XVIIIe siècle. Maintenant je suis bibliothécaire et je m'occupe d'un magnifique fonds anciens. Je n'achète que rarement des livres anciens maintenant, pour plusieurs raisons. La première est que je m'intéresse à l'espionnage et que malheureusement en livre avant le XIXe siècle, il n'y a pas grand chose de très intéressant. La seconde est que j'assouvis ma passion dans mon travail. Pour moi la bibiophilie est plus en rapport avec l'intellect et le visuel. Pas de sensualité je pense. J'admire un livre par sa reliure, la qualité de son papier et des caractères d'imprimerie, de ses gravures. Personne ne m'a formé et initié. Pour mes achats je passe par internet, je ne sais pas pourquoi, mais les librairies anciennes m'intimident.

Anonyme a dit…

Il y a bien des femmes bibliophiles.
Comme elles aiment le bon vin et les belles Porsche 356 A rouge.
Tout cela est une question de hasards, de rencontres, d'intelligences, et probablement d'éducation ou de volonté de ne pas se laisser impressionner par un milieu d'argent, par des hommes puissants dont le pouvoir de l'argent est manifeste.
Moins la méchanceté et l'orgueil, la bibliophile féminine est peut être encore plus confidentielle que celle des hommes.
Défendre ses valeurs là quand on est une femme semble encore plus contre nature aujourd'hui que dans les années 20 /30 où les femmes se sont libérés des carcans et des corsets ...
:)
Bon Noêl à vous!
L'Anonyme.

Hugues a dit…

Bonjour Laura et Véronique, merci pour commentaires ☺. Pourriez-vous me contacter à blog.bibliophile@gmail.com
Hugues

Gonzalo a dit…

Merci pour ce message et ces commentaires intéressants.
Juste une remarque en forme de question : y a-t-il plus de femmes dans les autres branches du collectionnisme ? La numismatique est un monde d'hommes et, autant que je peux en juger, la philatélie aussi...
L'explication du mystère ne vient-elle pas simplement d'une inertie, d'une histoire "lente à couler" : longtemps, dans les milieux bourgeois, les hommes étaient les seuls à avoir les moyens financiers d'assouvir leurs lubies, quand les femmes, qui ne travaillaient pas, dépendaient entièrement d'eux. In fine, la société moins patriarcale d'aujourd'hui offre aux femmes la possibilité de vivre plus simplement leurs passions, mais les anciens schémas sont toujours à l'oeuvre. Ça changera. Lentement, mais ça changera.

Gonzalo a dit…

Merci pour ce message et pour ces commentaires. Une remarque en forme de question : n'est ce pas un travers qui affecte toutes les formes de collectionisme ? La numismatique est un monde d'hommes, et je ne connais pas de femmes philateliste...
Il me semble que c'est simplement un effet de l'inertie, d'une histoire "lente à couler" (Braudel) : la bibliophilie est née à une époque, et dans des milieux, où les femmes, qui ne travaillaient pas, n'avaient pas les moyens d'assouvir leurs passions. Pour être bibliophile, il faut avoir le contrôle de ses finances personnelles. La société patriarcale s'est bien assouplie, mais par inertie les vieux schémas sont encore à l'oeuvre. Ca changera. Lentement, mais ça changera. Grâce à vous.

Anonyme a dit…

A l'évidence vous avez raison Gonzalo. On ne sort pas en claquant des doigts de milliers d'années d'un semi-esclavage intellectuallo-physique. D'autant plus quand les proto-gorilles de jadis prospèrent encore sur les ruines plus ou moins délabrées de leurs royaumes.

En espérant que le nivellement ne se fasse pas par le bas. Les futures femmes bibliophiles puissent-elles être moins conservatrices et unicellulaires que les hommes le furent.

Hélas, on se libère trop rarement de ses chaînes sans finir par en faire porter le poids à d'autres... Ah! Triste humanité :).

Anonyme a dit…

Il y a beaucoup de femmes bibliophiles en fait : les relieuses et restauratrices du livre depuis Berthe Van Regemorter et Rose Adler, par exemple, les curiosa sont-ils collectionnés uniquement pas les hommes ou certaines femmes y goutent-elles aussi?
Ce sont des questions d'un autre temps en effet.
j'ai commenté et répondu sur FB aussi parce que je trouve que cette distinction n'a plus lieu d'être.
Et je me permets de remettre un commentaire parce que les commentaires que j'y lit y sont intelligents, qu'ils proviennent de femmes ou d'hommes.
les caractéristiques qui réunissent femmes et hommes du livre et de l'amour du livre pourrait être l'humour et l'intelligence, le désir de s'élever et de partager.
Il est temps, non?
Bien à vous,
Sandrine.

Anonyme a dit…

Vous corrigerez les fautes bien entendu : que j'y lis et pourraient être.
S.

Pierre a dit…

Peu de femmes bibliophiles, c'est vrai, mais une tendance - il me semble - à voir entrer aujourd'hui dans ma boutique plus de couples qui vivent cette passion ensemble... Pierre

Unknown a dit…

Bonsoir

Je suis bibliophile depuis bien longtemps, n'ai jamais reagi aux commentaires sur les femmes bibliophiles, meme l'enquete du Slam il y a quelques années. Je me souviens qu'il y a d'un de mes premiers achats pour un montant respectable d'un ouvrage aupres d'un celebre libraire parisien, c'est tout juste s'il ne m'a pas demande si je savais lire...
Oui il y a des femmes bibliophiles, forcément discretes dans un univers tres masculin ou le fait d'etre reconnue comme bibliophile est encore plus difficile que d'etre reconnue professionnellement dans certains metiers. Oui j'aime les livres, pour bien des raisons, contenu, reliure, provenance, ouverture sur des sujets... Il ne se passe pas une journee sans une quelconque activite en liaison avec ma bibliotheque, ne serait que parcourir quelques pages au hasard mais egalement collationner, rechercher, simpliment regarder ou lire... cela revet forcement une certaine sensualite. Je crois aux bibliophiles amateurs de la vie dans tous les sens du terme, ouverts sur les arts, la gastronomie... Cela dit je dois beaucoup aux hommes qui m'ont appris a aimer les livres, qui orientent mes choix, et j'ai beaucoup de plaisir a partager avec des femmes libraires puisque je dois faire partie de cette tres faible proportion de femmes bibliophiles. En tout cas merci de vous y interesser.

Anonyme a dit…

Bonsoir à TOUTES et tous ;-)
Je vais peut être me faire taper sur les doigts, mais il me semble que presque toutes les collectionnites se fondent psychologiquement dans une forme de donjuanisme, de quête, assez typiquement masculine... Les femmes me semblent finalement moins attachées aux objets... Les gentes dames bibliophiles que je connais sont le plus souvent attachées à des thèmes féminins (broderie, histoire de la soie pour l'une par exemple). Le contre-exemple existe bien sûr, j'ai une amie qui traque, un peu en dilettante mais de façon méthodique et documentée, tout ce qui concerne Maïakovski... Mais aucune pour les livres anciens autour de moi.

En gros et pour dire vite, sur mes ventes eBay de livres, j'ai environ 5% d'acheteuses... Or je vends de tout... cela doit bien vouloir dire quelque chose... Je ne prétends pas trancher, mais du côté du constat empirique, il n'y a pas de doutes, la bibliophilie est majoritairement masculine...
Débat très intéressant, qui nous interroge sur les ressorts de nos passions, recherches, névroses, folies !

Anonyme a dit…


Marrante cette reflexion ebay, maintenant que vous le dites, je n'ai jamais rien vendu qui se collectionne à une femme sur ebay.

Anonyme a dit…

Bonjour,

Je vais me risquer à mon tout premier commentaire ici même si je lis ce blog depuis plus d'un an. Je suis une jeune femme de 30 ans et suis "tombée dans la marmite" depuis maintenant 10 ans approximativement. Mes thèmes touchent principalement les livres 17ème à la première moitié du 19ème sur l'histoire de l'art, la mythologie et l'histoire avec quelques petites entorses par ci par là. Je pense que la passion a pour origine plusieurs facteurs. J'ai toujours baigné dans les livres depuis mon enfance grâce à ma mère et mon grand-père. Ma mère m'a transmis le goût pour l'objet même (son odeur, son contact) ainsi que le plaisir de la lecture. Quand à mon grand père, il m'a ouvert sur la curiosité et m'a influencé sur l'amour des objets d'art et textes anciens aidés de ses nombreux objets ramenés au cours de divers voyages dans le cadre de l'élaboration de ses films. Ma formation en histoire de l'art a parachevé la "recette". J'ai découvert le sentiment de frustration avec mes bibliographies épuisées en librairie, les ouvrages déjà empruntés en bibliothèque et pourtant nécessaires pour les exposés etc. J'ai reçu aussi l'avantage d'obtenir l'accès à des livres rares et anciens dans des cadres tels que la magnifique bibliothèque Marciana. Le virus s'est insinué définitivement en moi! Je me souviendrais toujours de l'explosion des sentiments en moi lors de l'acquisition de mon Thomassin et son merveilleux recueil, mélange d'angoisse avec mon budget serré et l'adrénaline et le plaisir lorsque je l'ai feuilleté pour la première fois chez moi. Que ça soit un Winckelmann, un Collin de Plancy, Montfaucon ou encore une Danse macabre de De Chertablon le plaisir reste toujours intact!

Pour ce qui est d'un deux "X" chez les "XY", ce n'est pas toujours évident! Mon jeune âge n'aide en rien ma passion hormis peut être le fait de mal me jauger au moment des enchères. Néanmoins avec le temps, l'établissement de liens avec de bons libraires j'ai pu progresser et éviter les remarques désobligeantes ( "vous n'êtes pas dans le bon rayon mademoiselle", "êtes vous sûre d'en avoir le budget?" etc). Même si ma zone de confort s'arrête pour l'instant à une petite zone du sud ouest si je ne compte pas ebay.

Je pourrais donc conclure que nous avons notre place même si elle est petite, discrète et pas toujours facile à prendre. Mais la ténacité qu'apporte l'amour du livre permet de s'accrocher, résister et continuer. Après tout, une passion est toujours difficile à freiner surtout si elle est bien ancrée en soi...

Voila j'espère ne pas avoir été ennuyeuse pour mon premier commentaire et vous remercie pour votre blog fort utile pour acquérir de l'expérience.

Lauverjat a dit…

Bonjour Madame,
Vous n’êtes pas du tout ennuyeuse et je suis sûr qu’Hugues serait ravi de publier vos émotions et vos connaissances sur un de vos livres.
Venez, on se pousse un peu, installez-vous…
Lauverjat

Hugues a dit…

Mais absolument, chère anonyme, pourriez-vous d'ailleurs me contacter à blog.bibliophile@gmail.com?
Merci
Hugues

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